Un médecin qui investit dans l’immobilier locatif, doit évaluer l’opportunité de créer une SCI à l’impôt sur les sociétés (IS) ou une SCI à l’impôt sur le revenu (IR) ou investir en nom propre ou en EIRL statut très proche de investissement en nom propre.
Il n’y a pas de réponse qui convienne à tous les confrères, lorsque vous recevez un patient qui présente des douleurs abdominales, vous devrez identifier une étiologie et ensuite choisirez un traitement, en immobilier locatif la situation est identique dans certains cas la SCI à l’IS est pertinente dans d’autres cas elle représente un mauvais choix.

Nous rappellerons les grandes règles régissant les SCI puis étudierons et commenterons diverses situations pratiques pour vous guider.

Après lecture de cette page vous ne deviendrez pas un spécialiste de la SCI, vous serez capable de réaliser un choix éclairé avec votre avocat ou expert comptable.
Si la SCI reste un sujet absconse après lecture vous devez, consulter d’urgence un fiscaliste!

LA SCI EN BREF

COMBIEN D’ACTIONNAIRES

Pour constituer une SCI il faut 2 personnes au moins. Chacune de ces personnes peut être une personne physique ou une personne morale (une société, une association, un syndicat…).
Une SCI permet d’acheter à plusieurs en évitant le régime de l’indivision. L’indivision est un régime plus simple mais précaire.
Les associés d’une SCI sont indéfiniment responsables de la totalité des dettes de la SCI sur leurs biens propres.

LES STATUTS DE LA SCI

Les statuts encadrent le fonctionnement de la SCI. Il n’est pas conseillé d’utiliser des statuts types , téléchargés sur internet ou de signer des statuts sans les lire.
A la constitution de la SCI tout va bien, les confrères sont impatients de démarrer l’opération immobilière, mais qu’arrive-t-il lors de la survenue d’évènements imprévus?.
Citons l’apparition de déserts médicaux avec des cabinets médicaux acquis en SCI qui restent désespérément vides avec des charges à payer tous les mois.
Dans cette situation qui doit payer les charges, la réponse est dans les statuts.
Que se passe-t-il en cas de décès, de mésentente de changements de mode d’exercice et autres évènements de la vie non prévisibles, tout doit être réfléchi et anticipé dans les statuts.
Pour une protection optimale la rédaction des statuts doit être confiée à un notaire, avocat ou expert comptable familier des spécificités du monde médical.
La valeur ajoutée de ces professionnels est d’avoir été confronté au cours de leur carrière à diverses situations parfois conflictuelles et de connaître les remèdes.


QUEL TYPE DE SCI

Cet article est consacré aux SCI de gestion, créées par des confrères qui acquièrent des biens immobiliers pour les mettre en location.
Il peut s’agir de location de résidence secondaire ou de cabinets médicaux.
A côté des SCI de gestion il existe les SCI familiales, les SCI de construction ou d’attribution non abordées ici.


QUELLE ACTIVITÉ ?

Comme sa dénomination l’indique la SCI est une société civile qui ne peut pas exercer d’activité commerciale lorsque elle est assujettie à l’IR.

Le « I » de SCI indique que l’activité de la société civile doit être exclusivement immobilière.

Les SCI à l’IR pourront établir des baux de location de locaux nus.
Les locaux pouvant être d’habitation ou professionnels comme des cabinets médicaux.
Pour exercer une activité de loueur meublée (LM) ou loueur de locaux équipés (LLE) les actionnaires doivent opter pour l’IS, car pour le centre des impôts (CDI) la LM est une activité commerciale fiscalement.

QUELS SONT LES DIFFÉRENTS TYPES DE LOCATION ?

La location immobilière évolue en permanence pour s’adapter aux besoins des locataires qu’ils soient particuliers ou professionnels.
On distingue deux catégories de baux, les baux nus et les baux meublés ou équipés. Ces baux s’adressent à des particuliers ou à des professionnels comme les médecins.
A chaque type de location est associée une fiscalité particulière, un médecin bailleur qui loue un local nu à un confrère déclarera des revenus fonciers .
Ces revenus sont taxés à l’impôt sur le revenu au taux marginal d’imposition (TMI) puis à 17,2% de forfait social.
Un médecin qui loue le même local mais équipé, établira un bail commercial équipé, les revenus de location deviendront des redevances trimestrielles imposées comme des bénéfices industriels et commerciaux (BIC).
En conclusion le type du bail détermine le régime fiscal du bien loué.

QUEL RÉGIME POUR LA SCI

La SCI à l’IR est dite transparente ou translucide.
Après calcul du bénéfice annuel, l’associé reçoit sa part de résultat ou bénéficiera de sa part de déficit. Tout se passe comme si la SCI n’existait pas, la quote-part de revenu de l’associé est traitée comme les revenus fonciers d’une personne physique qui loue un bien.
Prenons l’exemple d’une sci constituée de 2 actionnaires qui détiennent chacun 50% des parts et ont un taux marginal d’imposition (TMI) de 30%.
Si la SCI réalise un bénéfice de 10.000€, chaque actionnaire recevra 5.000 € sur lesquels il paiera :
– au titre de l’impôt sur le revenu : 5000 * 0,30
– et au titre des prélèvement sociaux : 5000 * 0,172.
Le forfait social à 17,2% étant constitué de :
– 9,20 % de contribution sociale généralisée (CSG)
– 0,50 % de contribution au remboursement de la dette sociale (CRDS)
– et 7,5 % de prélèvement de solidarité.

La SCI est translucide car il n’y a pas de barrière entre le bénéfice de la société et les associés qui paient les impôts.

Dans une SCI à l’IR les revenus sont passifs puisque taxés dès que la déclaration du bénéfice est établie même si l’actionnaire n’a pas perçu le dividende.


la SCI à l’IS est dite opaque


La SCI à l’IS est opaque car interposée entre l’actionnaire et le fisc
La sci est soumises aux règles des BIC avec une double imposition.
Après calcul du bénéfice annuel, la société acquitte l’impôt sur les sociétés (IS). Le taux de l’IS est de 15% jusqu’à 42.500 € et de 25% au delà, ce qui représente la première imposition.
L’associé reçoit éventuellement ce qui reste sous forme de dividendes après paiement du PFU ou flat tax au taux unique de 30%, ce qui est la seconde imposition. Le versement de dividende est décidé lors de l’assemblée annuelle,
mais les dividendes peuvent rester dans la société et ne seront fiscalisés que lorsque ils seront distribués. Si le bénéfice n’est pas distribué sous forme de dividende il est mis en réserve ou réinvesti.
Exemple :
Jean et Jacques achètent chacun un cabinet médical de 200.000€ frais d’acquisition compris.
Les charges foncières sont de 5000€ l’an et les intérêts de l’emprunt s’élèvent à 5.000 €/an. Chaque confrère se loue un cabinet et se verse 15.000 €/an.

Jean et sa femme créent une SCI à l’IR avec des proportions de 80/20, chaque année le bénéfice de la société s’élève à 5.000 € sur le quel il verse 47% impôts et charges sociales il reste 2650 €/an pour rembourser le capital. Lorsque le bien est remboursé il appartient aux actionnaires.

Tout se passe comme si Jean possédait un bien d’une valeur de 80% du cabinet et sa femme 20% la sci est translucide. En cas de vente Jean et sa femme sont soumis à la plus-value (PV) des particuliers taxée fiscalement et socialement. Il existe une exonération fiscale au bout de 22 ans et sociale au bout de 30 ans.

Jacques et sa femme créent une SCI à l’IS chaque année le bénéfice de la société est nul car effacé par les amortissements ils ne paient donc aucun impôt sur les sociétés il reste 5.000 €/an pour rembourser le capital .
Lorsque le bien est remboursé il appartient en totalité à la société, il existe une barrière entre actionnaire et la société qui est « opaque ».
En cas de revente la SCI de Jacques et son épouse est lourdement taxée sur la PV au taux de l’IS puis le couple devra payer le PFU sur les dividendes si il veut récupérer ce qui reste.
La SCI est opaque car il y a une barrière entre les liquidités ou les biens de la société et les associés.

Cet exemple illustre le concept de la fiscalité, un minoration d’un impôt entraîne la majoration d’un autre.
Jean et sa femme paient de l’impôt sur le revenu tous les ans mais peu ou pas de PV.
Le couple Jacques ne paie pas d’impôt sur le revenu mais beaucoup de PV s’ il vend, et s’ il garde sa société est très riche mais pas Jacques !.


Il est évident que si une SCI idéale avec peu ou sans fiscalité existait l’autre disparaîtrait rapidement faute de candidat à payer l’impôt.

COMPTABILITÉ DES SCI

Une SCI à l’IR bénéficie du régime des revenus fonciers.
Une SCI à l’IR perçoit des loyers et retranche des charges foncières, le résultat de cette opération constitue le bénéfice de la société imposé comme signalé plus haut, à l’impôt sur le revenu selon la TMI et au forfait social de 17,2%.
Les déductions foncières sont strictement encadrées par la réglementation fiscale.

Une SCI à l’IS bénéficie du régime des Bénéfices industriels et commerciaux (BIC).
Une SCI à l’IS perçoit des loyers et retranche des charges foncières et surtout amortit le bien et les frais d’acquisition en plus des charges foncières courantes. Ces amortissements minorent voire annulent l’imposition pendant de longues années.
Lorsque il existe un bénéfice, celui-ci est taxé à l’impôt sur les sociétés (15% jusqu’à 42.500€ et 25% au delà jusqu’à 500.000€ et 35% au dessus de 500.000€).
Les dividendes éventuels versés aux actionnaires sont imposés au PFU (prélèvement forfaitaire unique) de 30%.
Comme précisé plus haut, on qualifie cette SCI d’opaque car il n’y a pas de transparence entre associés et administration fiscale.
Les déductions foncières possibles sont tous les frais engagés pour le fonctionnement de la SCI.
Exemple dans une SCI à l’IS il est possible de déduire des frais de déplacements pour suivre le chantier d’un bien alors que ce serait interdit dans le cas d’une sci à l’IR.

REQUALIFICATION D’UNE SCI


L’assujettissement à l’IS peut-être le choix de la totalité des associés, ce choix est irrévocable au bout de 5 ans.

La SCI à l’IR peut être requalifiée de plein droit en SCI à l’IS par l’administration fiscale si la SCI exerce une activité commerciale.
Ce peut être le cas d’une SCI qui acquiert régulièrement des bien pour les revendre ou d’une SCI qui loue des biens meublés ou équipés.
ATTENTION A CETTE SITUATION CAR IL FAUDRA RÉGLER IMMÉDIATEMENT LA PV LATENTE.

SCI ET PLUS VALUES


Dans les SCI à l’IR, les actionnaires bénéficient de la plus value des particuliers qui s’éteint progressivement dans le temps.
Cette PV possède une double imposition, fiscale qui disparaît au bout de 22 ans et sociale annulée en 30 ans, cela est long mais bon!.
Ce régime est précaire et régulièrement allongé en fonction des besoins financiers de l’état qui sont malheureusement toujours prégnants.
Par définition tout durcissement de la PV s’applique à tous les biens que vous possédez parfois depuis très longtemps puisque le calcul de la PV se fait conformément aux règles en vigueur au moment de la vente.

Dans le cas des SCI à l’IS, la PV restent identique dans le temps et son assiette est plus large que dans SCI à l’IR.
Pour les SCI à l’IS, la plus-value est le résultat de la soustraction prix versé par l’acquéreur moins valeur nette comptable.
La valeur nette comptable est le prix achat initial du bien diminué des amortissements.
Lors d’une vente le montant de cette PV est soumis à l’IS .
Les capitaux restant après acquittement de la PV sont à l’intérieur de la société, si l’actionnaire veut récupérer les fonds il devra payer le PFU de 30%.

En résumé dans une SCI à l’IR on profite des revenus fortement fiscalisés mais réguliers et l’on peut encaisser une PV défiscalisée au bout de 30 ans.
Dans le cas d’une SCI à l’IS on se crée un patrimoine immobilier qui reste dans la société, on profite du cash-flow pour rembourser le bien mais il existe une importante PV si l’on revend.
Dans le régime à l’IS les avantages fiscaux accumulés ne seront jamais remis en cause, « ce qui est pris est pris ».
Conclusion :

  • avec SCI à IR on profite de la vie
  • avec SCI à IS on constitue un patrimoine immobilier.

AVANTAGES DES SCI

  1. pour toutes les SCI

    – Les SCI permettent d’acquérir un bien à plusieurs évitant le régime précaire de l’indivision.
    Dans le cadre de l’indivision un des indivisaires peut décider de quitter l’indivision entraînant la mise en vente automatique du bien.
    Dans le cadre de la SCI un sociétaire souhaitant vendre ses parts doit les proposer aux autres associés, si aucun n’est intéressé, il devra trouver un acheteur extérieur, s’il ne trouve personne il conserve ses parts, le bien est préservé dans le temps.
    On prévoira dans les statuts de la SCI une sortie ordonnée en fonction des aléas de la vie, celui qui souhaite rester sera mieux protégé que celui qui souhaite partir.
    De nombreux confrères ont été confrontés à cette situation dans des cabinets médicaux organisés en SCI, lorsque des sociétaires souhaitaient partir en retraite sans successeur. Les retraités ont du continuer à assumer les dépenses de la SCI alors que leur cabinet était vide.
    Les déserts médicaux devraient disparaître progressivement, les tutelles ont découvert qu’un médecin s’installe en ville entre 25 et 30 ans et part en retraite entre 65 et 70 ans. Après cette intéressante constatation le ministère va pouvoir calculer le nombre de médecins à former chaque année!!
    A l’avenir la tendance devrait s’inverser et les maisons médicales bien conçues deviendront attractives.

    – Les SCI facilitent la transmission en simplifiant les donations, les démembrement d’usufruit et nue-propriété
    .
    – Les SCI peuvent protéger des concubins avec le démembrement croisé.
  2. Avec une SCI à IR on peut :
    – investir à plusieurs pour acheter un bien et bénéficier de revenu fonciers. Rappelons que l’on déduit du montant des loyers, les charges foncières, ce qui définit le résultat de la SCI à l’IR. En cas de bénéfice le sociétaire sera taxé au TMI et au forfait social.

  3. – Bénéficier des PV des particuliers. Un bien acquis par une SCI est exonéré de PV fiscale au bout de 22 ans et de PV sociale au bout de 30 ans.

  4. – Obtenir des revenus réguliers quoique lourdement fiscalisés.

  5. – Bénéficier des déductions comme la loi Pinel , Malraux si ce n’est pas l’intermédiaire qui confisque l’économie d’impôts.
    De nombreux confrères content de croustillants récits d’arnaques perpétrées dans le crédule monde médical, par des promoteurs peu scrupuleux.
  6. Avec une SCI à l’IS :
    – on bénéficie de loyers défiscalisés pendant au moins 15 ans grâce à la déduction des amortissements des frais d’acquisition et surtout l’amortissement de 85% du prix d’achat du bien.

    – on se constituera un patrimoine immobilier illimité qu’il soit loué nu ou meublé à condition de ne jamais vendre.

    – la totalité des frais engagés pour le fonctionnement de la SCI est déductible
    dans une rubrique adéquate, si vous invitez votre architecte à dîner ou si vous vous rendez à plusieurs centaine de KM pour suivre le chantier de votre futur bien, les frais seront déductible dans une SCI à l’IS et non dans une SCI à l’IR.
    Dans une SCI à l’IR la liste des dépenses déductibles des revenus fonciers est limitée et strictement encadrée.

    – les règles fiscales sont stables, le taux de l’impôt sur les société se modifiera sans doute à la baisse dans les années à venir.
    Vous n’aurez pas à vous soucier des modifications des régimes bricolés comme le LMNP voué à être réformé ou à disparaître.

    – vous pourrez imaginer des usines à gaz avec des holding pour économiser des impôts, mais Berçy vous retrouvera au moment de la vente!
    A partir de 2023 il va falloir être de plus en plus inventif car la fiscalité des SEL médicales est dans le viseur du fisc et du conseil de l’ordre.

A RETENIR

  1. Une SCI à l’IR permet de réaliser de la location nue et de bénéficier de revenus réguliers
  2. Une SCI à l’IS autorise d’importantes déductions fiscales mais les capitaux restent dans la société et sont lourdement imposés si l’actionnaire souhaite en profiter.
  3. Une SCI à l’IS autorise location nue ou meublée de locaux d’habitation ou professionnels
  4. Le choix dépend de ses objectifs
  5. Vous n’avez pas tout compris, pas d’inquiétude, des cas pratiques dans le prochain article.